L’ONU et la Francophonie appellent à un sursaut de la communauté internationale face à l’exacerbation des violences armées en Centrafrique où des civils sont de plus en plus visés en raison de leur appartenance ethnique ou religieuse. Tout aussi préoccupée par cette situation, la communauté chrétienne Sant’Egidio tente de réunir cette semaine à Rome les principaux protagonistes. Une énième tentative de sortir le pays d’un conflit meurtrier sans précédent qui dure depuis déjà quatre ans.
Si la capitale centrafricaine, Bangui, peut encore applaudir au stade l’équipe nationale de football, comme le 11 juin dernier lorsqu’elle a battu celle du Rwanda, les régions du Centre et de l’Est du pays traversent depuis quelques semaines les moments les plus sombres depuis le début de l’année. Rien qu’au cours du mois de mai, plusieurs dizaines de Centrafricains ont été tués ou blessés lors de violences armées à connotation ethnique ou religieuse. La force de l’ONU dans le pays n’a pas été épargnée, déplorant au cours de la même période une demi -douzaine de soldats de la paix tombés sous les balles de groupes armés.
« L’heure est grave », a estimé le 12 juin devant le Conseil de sécurité, le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU pour la Centrafrique, Parfait Onanga-Anyanga. "Un sursaut national est plus que jamais indispensable", a déclaré le diplomate gabonais. Le chef de la Mission de l’ONU en Centrafrique a évoqué l'intensité des attaques, leur caractère prémédité ainsi que le ciblage des minorités ethniques qui rappellent les plus sombres moments de la crise en RCA.
« Le fait nouveau, aussi troublant que révoltant, c'est l'agression systématique et acharnée contre les soldats de la paix », a-t-il poursuivi. Face à l’exacerbation des violences, en particulier dans les préfectures de la Haute-Kotto, du Mbomou, de la Ouaka, de l'Ouham et de l'Ouham-Pendé, Parfait Onanga-Anyanga a par ailleurs interpellé la communauté internationale. « Si nous ratons ce rendez-vous, le jugement de l'histoire sera sans concession », a-t-il averti.
« Il est urgent de nous mobiliser »
Un appel repris à son compte le mercredi 14 juin par Michaëlle Jean, secrétaire générale de la Francophonie, une organisation regroupant 58 Etats membres, dont la Centrafrique. « Il est urgent de nous mobiliser contre cette violence armée », a estimé Michaëlle Jean, dans un communiqué. La secrétaire générale de la Francophonie a effectué en avril dernier une visite en Centrafrique au cours de laquelle elle a pu se déplacer dans le pays avec le président Faustin-Archange Touadéra et se « rendre compte de l’urgence à rétablir rapidement la paix à travers notamment la réconciliation nationale et à mettre ainsi fin au cycle de violences dont les populations civiles sont les premières victimes », toujours selon le communiqué de son organisation. « Mes échanges réguliers avec les plus hautes autorités centrafricaines ainsi qu’avec les partenaires internationaux sur place soulignent avec force l’urgence de mobiliser les fonds nécessaires pour mettre en œuvre, de manière concrète, le Plan national de relèvement et de consolidation de la paix présenté en novembre 2016 à Bruxelles », a-t-elle ajouté.
Les yeux tournés vers Rome
Face à cette situation, la communauté Sant’Egidio basée à Rome, s’efforce, de son côté, de réunir les principaux protagonistes de la crise centrafricaine. Née en 1968 à Rome, la Communauté de Sant'Egidio est une "association publique de laïcs de l'Eglise », qui, entre autres valeurs, prône le dialogue comme mode de vie et moyen de résolution des conflits.
Les médias centrafricains ont ainsi annoncé mercredi que chefs de groupes armés, dirigeants politiques centrafricains et responsables de la société civile convergeaient depuis la fin de la semaine dernière vers Rome. Selon le Réseau des journalistes centrafricains des droits de l’Homme (RJDH), Anicet Georges Dologuelé, chef de l’opposition parlementaire, et Martin Ziguélé, président du Mouvement de libération du peuple centrafricain (MLPC) et soutien du président Touadéra, ainsi que l’ex-président de l’Assemblée nationale de transition Alexandre Ferdinand Nguendet, seraient au rendez-vous. La présidence de la République serait représentée par un ministre conseiller politique du chef de l’Etat, selon la même source qui ne précise cependant pas quels sont les groupes armés présents. Des dirigeants politiques non invités se montrent cependant pessimistes quant à l’issue de la rencontre. «Ce n’est pas la première fois que cette communauté rassemble des leaders à Rome. Il n’y a au fait aucun espoir à fonder sur cette rencontre qui n’est autre qu’une balade. Le problème centrafricain sera réglé à Bangui avec le plus de monde possible », a indiqué au RJDH, Joseph Bendounga, président du Mouvement démocratique pour la renaissance et l’évolution de Centrafrique (MDREC).
N’empêche que de nombreux Centrafricains ont maintenant les yeux tournés vers Rome.