Cette semaine marque la fermeture du Tribunal International pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) après près de 25 ans d’activité.
À sa création, peu de diplomates et acteurs des guerres de l’Ex-Yougoslavie pariaient sur ce Tribunal le premier créé depuis Nuremberg pour juger des criminels de guerre.
Mais, finalement, cette Cour a rempli sa mission au nom du droit et de l’histoire. La correspondante de JusticeInfo.net à la Haye écrit : « En près d’un quart de siècle, 90 responsables de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre ont été condamnés et 19 acquittés, au cours de 10 000 jours de procès et grâce, notamment, aux dépositions de plus de 5000 témoins ». Pour le Secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres, venu à la Haye clore symboliquement ses travaux, le TPIY « a créé l’architecture contemporaine de la justice internationale ». Et permis aux tribunaux pour le Rwanda, la Sierra Léone, le Cambodge, et à Cour pénale internationale d’exister. Ce qui n’est pas un mince achèvement pour le droit et pour l’histoire.
Bien sûr, le travail de ce tribunal restera incomplet, critiqué. Plusieurs de ses verdicts restent hasardeux et discutés.
Surtout, écrit Pierre Hazan, dans un article sur « La saveur amère de la justice internationale dans les Balkans”, cette justice n’a été ni comprise, ni acceptée par les pays et les hommes engagés dans les guerres des Balkans. “Ce qui frappe avant tout, c’est l’infinie distance entre la vérité judiciaire et l’écho que celle-ci suscite dans les sociétés les premières concernées. Avec courage, mais aussi avec tristesse, le procureur du TPIY est le premier à reconnaître que ceux qui sont glorifiés aujourd’hui, ce sont les criminels de guerre et non leurs victimes”. Et de conclure : “cet échec exige une réflexion profonde sur le défi que représente la capacité d’une Cour internationale à faire passer son message dans des sociétés divisées”.
Même si à l’autre bout du monde, loin de l’Europe, des hommes et des femmes attendent toujours beaucoup de la justice y compris internationale quand des crimes contre l’humanité sont toujours perpétrée. Ainsi, en République Démocratique du Congo, où un rapport implacable de la FIDH décrit les massacres menés par les hommes du main du Président Kabila afin de rester au pouvoir. La FIDH dénonce “un chaos organisé” dont été notamment victimes des dizaines de civils, femmes et enfants, à Kamonia entre mars et juillet dernier dans le KasaÏ. Dans une interview à JusticeInfo.net, Paul Nsapu, secrétaire général de la FIDH pour l’Afrique, explique : “Nous parlons de « Chaos organisé » parce que le Président Kabila et les membres de son régime ont entretenu ou créé des foyers d’insécurité dans plusieurs régions du pays”.
La FIDH a notamment enquêté sur la région de Kamonia où des atrocités de grande ampleur (tueries, viols et incendies des domiciles, des écoles et hôpitaux) ont été commises par des agents de l’Etat, notamment des éléments des forces de défense et de sécurité congolaises en complicité avec une milice locale pro gouvernementale. Paul Nsapu explique : “Il revient aux institutions nationales d’abord, internationales ensuite, de s’impliquer pour que des poursuites judiciaires sont lancées contre les auteurs des crimes et ceux qui les ont planifiés et qui en sont les auteurs intellectuels. Mais, étant donné que la justice congolaise n’est nullement indépendante, il reviendra à la justice internationale de prendre ses responsabilités”.
Mali: questions sur la Commission
Souci de justice toujours au Mali, où notre correspondant décrit, une Commission Vérité, Justice et Réconciliation (CVJR) , très loin des attentes des victimes, citant notamment Mme Haïdara Aminaï Maïga, présidente du Conseil national des victimes (CNV), selon laquelle la commission est “ constituée sans les victimes”. “Le partenariat n’est pas franc. C’est déplorable”, condamne-t-elle. Bokar Sangaré, notre correspondant à Bamako, ajoute : “Dans un récent rapport Mali : “face à la crise, faire le choix de la justice”, les organisations de défense des droits de l’homme ne font pas mystère de leur impatience”.
« Il y a un retard dans le processus juridictionnel », estime Drissa Traoré, coordinateur de programme à la FIDH-AMDH, qui pointe un déficit de volonté pour faire face aux défis de justice, d’autant que les groupes armés, représentés au sein de la Commission, sont plutôt pour un processus traditionnel”. C’est à dire sans travail de justice, ni de mémoire et sans réparations.