La campagne électorale qui a démarré le 7 juillet au Mali, ne soulève pas d’enthousiasme dans certaines villes du nord et du centre du pays, en proie à une recrudescence de l’insécurité. Moins de 48 heures après le lancement de la campagne, quatre personnes ont été tuées dans une attaque à Tombouctou, tandis que dans le centre, une milice jurait, après un affrontement avec les forces armées maliennes, de « tout faire pour que les élections ne se tiennent pas au pays dogon ». Une vingtaine de candidats briguent la magistrature suprême du Mali, dont le sortant Ibrahim Boubacar Keita, candidat du Rassemblement pour le Mali (RPM), et le chef de file de l’opposition Soumaila Cissé, porte-drapeau de l’Union pour la République et la démocratie (URD).
Tombouctou, la cité des 333 saints, est loin, selon Studio Tamani, de vibrer au rythme de la campagne électorale. A moins de quatre semaines du scrutin présidentiel du 29 juillet, pas d’affiches publiques, ni d’animation musicale particulière. Interrogé par Studio Tamani, le directeur de campagne du principal parti de l’opposition pour la région de Tombouctou, Mahalmoudou Maïga, tente une explication. « Jusqu'à présent, nous n'avons pas encore reçu le support de campagne » en provenance de la capitale, Bamako. « On doit nous envoyer de quoi faire la campagne. A ce jour, ce n'est pas encore arrivé au sein de la fédération régionale », poursuit ce représentant de l’Union pour la République et la démocratie (URD) avant de se rendre à l’évidence. « A cela s'ajoute, l'insécurité grandissante à Tombouctou. On ne peut pas circuler comme on le veut ».
Pour sa part, Abdoulaye Touré, représentant du Rassemblement pour le Mali, affirme que « la première phase de la campagne tourne autour d'un problème essentiel qui est la distribution des cartes ». « Nous sommes dans des mécanismes de mobilisation autour de ces distributions d'abord. On se dit que deux semaines, ça nous suffit pour largement faire cette animation autour de la campagne », espère-t-il.
Et que dit la population locale ? « Non seulement, les politiques n'ont pas les moyens sur place, mais aussi les populations qui doivent faire sentir la ferveur électorale sont occupées à autre chose. Les gens sont occupés à chercher à manger. Aujourd'hui, les gens n'ont pas l'esprit à cette élection- là. Ils se soucient de leur sécurité personnelle », explique un habitant de Tombouctou, interrogé par Studio Tamani.
« Peur d’être attaqués par des djihadistes »
Dans le centre du pays, notamment dans la région de Mopti, les préoccupations sont aussi d’ordre sécuritaire, comme l’explique Souleymane Koné, président de la coordination des ONG de Youwarou. « Il n’y a pas de mobilisation (…) L’administration n’est pas là non plus, les gens ont peur d’être attaqués par des djihadistes. Il y a aussi la misère qui frappe la population ».
Pour sécuriser la campagne électorale et le scrutin lui-même, le gouvernement malien entend mobiliser quelque 30.000 éléments des forces de sécurité et de défense. La communauté internationale s’attend à ce que ce scrutin puisse sauver de l’enlisement l’accord de paix inter-malien signé en 2015, au terme de longues et laborieuses négociations à Alger. Censé ramener la paix dans le nord du pays, fief d’anciens rebelles majoritairement touareg, cet accord de paix est souvent mis à rude épreuve par des affrontements meurtriers entre mouvements signataires.
C’est la Mission de l’Onu au Mali (MINUSMA) qui s’est chargée, ces dernières semaines, d’acheminer le matériel électoral dans cette partie du pays. Elle s’est par ailleurs engagée à y transporter les candidats qui le souhaitent.
Seule femme dans la course, Kanté Djénéba N'Diaye, a été la première à faire campagne le jeudi 12 juillet à Kidal, ville emblématique du septentrion. Elle y a devancé même les favoris, Ibrahim Boubacar Keita et Soumaila Cissé.