Le groupe de réflexion International Crisis Group (ICG) met en garde contre "une spirale de la violence" au Burundi, où le pouvoir du président Pierre Nkurunziza s'est "radicalisé" ces dernières semaines, dans un nouveau rapport rendu public samedi.
"La mobilisation contre le troisième mandat du président sortant n'a pas faibli et la confrontation entre le pouvoir et ceux qui se rallient sous la bannière du mouvement +Halte au troisième mandat+ s'intensifie", constate ICG.
"Alors que le président reste sourd aux pressions internationales et compte organiser des élections municipales et législatives le 5 juin et le scrutin présidentiel le 26 juin, tous les éléments d'un conflit ouvert sont en place", met en garde ICG.
Le Burundi est plongé depuis un mois dans une grave crise politique, avec des manifestations quotidiennes pour contester la candidature du président Pierre Nkurunziza, au pouvoir depuis 2005, à un troisième mandat à l'élection présidentielle du 26 juin. Les violences ont fait plus d'une trentaine de morts.
"Pour éviter une amplification de la spirale de violence, il ne faut pas seulement retarder les élections, il faut aussi rétablir un climat politique et sécuritaire qui rende possible un scrutin pluraliste et libre", souligne le rapport, et le sommet des pays d'Afrique de l'Est (EAC), prévu dimanche à Dar es Salaam (Tanzanie), "offre une occasion à saisir pour réfléchir et agir dans ce sens".
"La semaine après la tentative de putsch (le 13 mai dernier, contre le président Nkurunziza) a été marquée par la radicalisation du pouvoir et des tentatives d'arrestation de journalistes et de politiciens", observe ICG.
"Dans ce climat de peur et d'incertitude, plusieurs scénarii sont envisageables, allant du très improbable retrait de la candidature du président Nkurunziza aux bien plus dangereux chemins menant à un conflit plus ou moins violent et persistant".
"Une issue pacifique est encore possible si certaines mesures sont prises rapidement", selon ICG, notamment un "report immédiat" des scrutins de juin, et l'élaboration d'un nouveau calendrier électoral "répondant à la fois aux attentes de l'opposition et du pouvoir en place".
ICG demande également "la libération des personnes arrêtées lors des manifestations, le rétablissement de la liberté d'expression, de réunion pour l'opposition et la liberté d'information pour les médias indépendants", et aussi "l'usage proportionné de la force par les services de sécurité".
"Certains médias ainsi que les discours des hommes politiques devraient faire l'objet d'un suivi précis, notamment par la société civile et par le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), en termes d'incitation à la haine ethnique", relève l'organisation.
"En cas de refus par le pouvoir de repousser les scrutins et d'un renforcement du climat répressif", ICG suggère une suspension de toute aide budgétaire au gouvernement en place, ainsi que l'ouverture d'une enquête par la CPI sur les violences et assassinats commis depuis le début des manifestations.
Enfin, ICG propose que la participation du Burundi aux missions de maintien de la paix sur le continent soit "réexaminée". L'armée burundaise participe à de telles missions en Somalie et en Centrafrique, qui sont indirectement une source importante de revenus pour le pays.