Près de quarante personnes en majorité des policiers ont été tuées et des dizaines blessées lundi dans un attentat suicide au véhicule blindé au nord-ouest de Bagdad, une attaque dont le mode opératoire rappelle celui du groupe jihadiste Etat islamique (EI).
Cette organisation ultraradicale sunnite sème la terreur en Irak mais aussi en Syrie voisine où elle a repoussé les forces gouvernementales dans le centre et avancé dans le nord, fragmentant encore davantage le pays en guerre.
La stratégie à adopter face aux avancées de l'EI dans ces deux pays sera au centre d'une réunion mardi à Paris des pays de la coalition internationale antijihadistes dont les quelque 4.000 raids aériens en dix mois n'ont pas réussi à stopper l'EI.
A la veille de cette réunion, l'Unicef a annoncé que des organisations humanitaires lanceraient jeudi à Bruxelles un appel de fonds de 500 millions de dollars (454 millions d'euros) pour répondre à la crise en Irak, où la situation humanitaire est "proche de la catastrophe".
Dans l'une des attaques les plus meurtrières cette année en Irak, 37 personnes ont été tuées quand un kamikaze a lancé son véhicule blindé bourré d'explosifs contre une base de la police entre Samarra et la région du lac Tharthar, dans la province de Salaheddine, au nord-ouest de Bagdad, selon des officiers.
"Il s'agit surtout de policiers", a indiqué un médecin à l'hôpital de Samarra. Trente-trois personnes ont été blessées.
Selon certains policiers, le kamikaze conduisait un char.
- 'Camions bombes' -
L'attaque n'a pas été revendiquée mais son mode opératoire rappelle celui de l'EI, qui s'est emparé au fur et à mesure qu'il avance dans des régions irakiennes des véhicules blindés et des chars abandonnés par les forces irakiennes dans leur retraite.
Les jihadistes ont eu recours à une trentaine de ces "camions bombes", bourrés de tonnes d'explosifs et protégés avec des armatures en acier, dans leur conquête de Ramadi, la capitale de la province occidentale d'Al-Anbar, le 17 mai.
Les forces de sécurité ont cependant réussi ces derniers jours, grâce à des systèmes de guidage antichars, à déjouer certaines de ces attaques.
La base visée lundi est située dans la zone d'opérations des forces irakiennes et des milices chiites qui tentent de couper les voies de ravitaillement de l'EI dans la province occidentale proche d'Al-Anbar.
Aidés des milices chiites et de tribus loyales, les forces fédérales ont lancé le 26 mai une opération à partir de la province de Salaheddine destinée à isoler les jihadistes dans celle voisine d'Al-Anbar, avant de donner l'assaut à Ramadi. Elles ont réussi depuis à reprendre plusieurs secteurs autour de ce chef-lieu.
Depuis leur offensive fulgurante lancée il y a un an, le 9 juin, l'EI responsable d'atrocités et accusé de crimes contre l'Humanité, s'est emparé de larges pans du territoire irakien.
Le 29 juin, il a proclamé un "califat" sur les territoires qu'il contrôle à cheval entre l'Irak et la Syrie où il a profité de la guerre pour prendre le contrôle de vastes régions.
- Mai, mois le plus meurtrier en Syrie -
En Syrie, le mois de mai a été le plus meurtrier depuis le début de l'année avec 6.657 morts, en majorité des soldats et des jihadistes, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).
Plus de 220.000 personnes ont péri depuis le début en mars 2011 du conflit en Syrie, déclenché par la répression d'une contestation qui s'est ensuite militarisée avant que le pays ne plonge dans une guerre civile rendue complexe par l'intervention des jihadistes.
L'EI, qui contrôle la moitié du territoire syrien selon l'OSDH, a encore étendu son emprise près de la frontière turque (nord) et capturé une position sur un carrefour clé au sud de la cité antique de Palmyre (centre) conquise le 21 mai.
"La route est désormais ouverte (pour l'EI) de Palmyre à la province d'Al-Anbar", selon un militant.
Pour le géographe français spécialiste de la Syrie, Fabrice Balanche, "entre l'Irak et la Syrie, le groupe s'est emparé de près de 300.000 km2 de territoire", ce qui correspondrait au "11e pays arabe par sa superficie (..) sur les 22 que compte la Ligue arabe".
"Ce que vit le pays est une 'somalisation', les fronts sont en feu partout, mais la partition ne rentre pas dans la stratégie de l'armée", affirme une source militaire à Damas.