" La chambre lui donne alors lecture de l'acte D'accusation dans une langue qu'il comprend et l'invite à plaider sur chacun des chefs D'accusation.
Augustin Bizimungu, 50 ans, s’est présenté devant la chambre en costume bleu foncé et chemise blanche, portant une cravate bariolée, les cheveux coupés court. Si sa mine était grave, sa voix était claire et assurée. Après avoir demandé des éclaircissements sur le nombre de chefs D'accusation, il a répondu par la négative, en français, à tous les dix : génocide, entente en vue de commettre le génocide, complicité de génocide, crimes contre l'humanité (assassinat, extermination, viol, persécution, autres actes inhumains), et crimes de guerre.
Assisté D'un avocat "de permanence", Augustin Bizimungu a comparu devant le juge slovène Pavel Dolenc.
Selon l'acte D'accusation, Augustin Bizimungu aurait été informé dès le 7 avril 1994 que des massacres contre la population tutsie avaient débuté et que plusieurs civils avaient trouvé refuge au camp militaire de Ruhengeri (nord du Rwanda).
"Augustin Bizimungu a ordonné à ses subordonnés de chasser les civils du camp et D'empêcher quiconque D'y entrer". Dans les minutes qui ont suivi, ils ont été exécuté en sa présence par des civils armés. "Augustin Bizimungu n'a rien fait pour les protéger".
Augustin Bizimungu a D'abord dirigé le secteur militaire de Ruhengeri, avant D'être nommé chef D'Etat-major par le gouvernement intérimaire entré en fonction en avril 1994.
Dissimuler un massacre l'acte D'accusation ajoute qu'entre le 10 et le 15 avril 1994, plusieurs Tutsis qui avaient cherché refuge à la préfecture de Ruhengeri ont été conduits dans l'enceinte de la Cour D'Appel locale sur ordre D'Augustin Bizimungu. Leur sécurité devait être assurée par la gendarmerie. Mais, dans les heures
qui ont suivi, ils ont été abattus par des civils armés, selon le document lu à l'accusé. "Pour dissimuler ce massacre, Augustin Bizimungu a donné ordre de diffuser un communiqué à la radio, alléguant qu'une attaque du FPR [ex-rébellion à dominante tutsie, actuellement au pouvoir à Kigali] était responsable de la
mort de ces réfugiés.", indique l'acte D'accusation.
Augustin Bizimungu est également accusé D'avoir distribué des armes aux civils hutus qui les ont utilisé pendant le génocide. Il lui est également reproché des actes commis par ses subordonnés, les militaires de l'ancienne armée rwandaise.
Augustin Bizimungu est coaccusé avec quatre autres officiers dont trois sont détenus à Arusha. Le quatrième, Protais Mpiranya, commandant de la garde présidentielle, est toujours en fuite. Il est activement recherché par les enquêteurs du TPIR.
Bizimungu a été interpellé en Angola le 12 août dernier. Il a été découvert dans un camp de soldats démobilisés du mouvement rebelle angolais, l'UNITA.
l'arrestation de Bizimungu a "réjoui" le gouvernement rwandais qui le suspectait D'être à la tête des rebelles hutus actifs en République démocratique du Congo. De son côté, Arusha a qualifié son interpellation comme étant "l'une des plus importantes effectuées par le TPIR" depuis sa création en novembre 1994.
Augustin Bizimungu se trouvait sur la liste américaine des suspects les plus recherchés pour leur rôle présumé dans le génocide anti-tutsi et les massacres D'opposants qui ont fait un million de morts au Rwanda entre avril et juin 1994.
l'organisation américaine de défense des droits de l'homme, Human Rights Watch a déclaré que son arrestation et son transfert vers le TPIR "marquent
un pas important" dans le processus de rendre justice en rapport avec le génocide rwandais.
"Il figure parmi les deux ou trois personnalités les plus recherchées par le Tribunal", avait pour sa part commenté le porte-parole du TPIR, le Nigérian Kingsley Moghalu, peu après l'interpellation de Bizimungu.
Le procès de Bizimungu ne devrait pas s'ouvrir avant quelques mois, selon des sources au sein du TPIR.
AT/GF/FH (BZ-0821A )