Omar Serushago, qui s'est présenté comme un ancien informateur du bureau du procureur du TPIR, a fait une description physique de l'enquêteur qu'il incrimine, insinuant qu'il voyagerait sous une fausse identité et l'accusant "D'être là pour induire la cour en erreur".
Omar Serushago a été cependant incapable de donner son nom et s'est en outre trompé en ce qui concerne les fonctions qu'il a exercées au Rwanda avant le génocide.
Omar Serushago était en plein contre-interrogatoire mené par l'avocat béninois, Me Alfred Pognon, qui représente l'ancien conseiller politique au ministère des affaires étrangères et membre du comité D'initiative de la Radio-télévision libre de Mille collines (RTLM), Jean-Bosco Barayagwiza, l'un des coaccusés de Ferdinand Nahimana.
"Votre réponse liée à l'incident que vous avez tenté de produire montre que la cour doit prendre avec mépris votre témoignage", a déclaré Me Pognon, suscitant une objection du parquet.
La représentante kenyane du procureur, Charity Kagwi, a indiqué que cette remarque de l'avocat était inappropriée à ce stade de la procédure.
Prenant la parole à son tour, l'avocat français de Ferdinand Nahimana, Me Jean-Marie Biju-Duval, a qualifié les allégations formulées par Serushago de "nouvelle tentative de déstabilisation de l'équipe de défense sur son élément le plus vénérable, à savoir l'enquêteur rwandais".
Me Biju-Duval a rappelé que l'enquêteur de la défense de Nahimana, Aloys Ngendahimana,"a déjà au mois de juillet dernier été mis en cause de façon diffamatoire, de la façon la plus grave qui soit" et qu'au terme D'une enquête qui a duré quatre semaines, "cet homme a été lavé de tout soupçon".
Le greffe avait suspendu Aloys Ngendahimana dans ses fonctions D'enquêteur de la défense, croyant qu'il se trouverait sur la liste des personnes recherchées par la justice rwandaise pour génocide. Une enquête subséquente a révélé qu'il y a eu erreur sur son identité et il a été réhabilité.
l'avocat de Nahimana a déclaré que "M. Omar Serushago, à l'évidence mis en difficulté par les questions de mes confrères, a tenté une diversion[..] Est-il soutenu par D'autres organisations?" Me Biju-Duval a plaidé qu'il s'agissait D'une "pure diffamation qu'il faudra sanctionner".
Soulignant le risque que peut courir une personne accusée de la sorte, l'avocat français a exigé que des "dispositions protectrices soient prises à l'endroit de l'enquêteur de Ferdinand Nahimana". "A la sortie de la salle D'audience, il risque D'être exposé à des agissements qui peuvent porter atteinte à son intégrité personnelle", a expliqué Me Biju-Duval.
Après délibération, la chambre a indiqué qu'elle comprenait la préoccupation de Me Biju-Duval en ce qui concerne les problèmes que pourraient créer cette situation quant à la réputation de l'enquêteur et les risques qu'il peut courir.
La chambre a ajouté qu'elle n'était pas impliquée dans des enquêtes et n'allait pas non plus prendre aucune mesure, si ce n'est de demander au greffe de lui fournir le rapport qu'il a établi au sujet de l'enquêteur.
Les juges ont par ailleurs précisé qu'ils ne peuvent nullement être influencés par les allégations portées par Serushago à l'égard de l'enquêteur.
l'avocate anglaise, Me Diana Ellis, co-conseil de Ferdinand Nahimana, a sollicité des directives générales pour que pareille situation ne se reproduise, dans cette chambre ou dans D'autres, mais sa requête a été rejetée.
Pour Me Ellis, le témoin, de l'endroit où il se trouvait, ne pouvait pas voir l'enquêteur, assis dans la galerie réservée au public.
Au TPIR, le témoin est assis devant les juges, le dos tourné à l'assistance et la cour est séparée de la galerie publique par une vitre blindée. La déposition D'Omar Serushago se poursuivait jeudi dans l'après-midi.
Omar Serushago est le trente-deuxième témoin du parquet dans ce procès qui concerne également l'ancien directeur et rédacteur en chef de la revue Kangura, Hassan Ngeze. Les avocats affirment que sa déposition est "fabriquée".
AT/PHD/FH (ME_1122A)