Lundi, la chambre avait siégé pour le commencement du procès, mais avait D'abord dû entendre et trancher sur la requête de la défense mettant en cause la compétence du TPIR à juger l'accusé. La requête a été rejetée.
Dans sa déclaration liminaire, le substitut australien du procureur, Ken Flemming, a déclaré à la Cour que le parquet entendait appeler à la barre une quinzaine de témoins pour soutenir les onze chefs retenus contre l'accusé.
"Cette affaire a trait à trois jours horribles dans Ruhengeri, au nord du Rwanda, bastion de feu président Juvénal Habyarimana," a dit le représentant du parquet. "l'avion présidentiel a été abattu dans la soirée du 6 avril 1994. Très tôt dans la matinée du 7 avril, les massacres ont commencé […] Nos éléments de preuves incluront le fait que très tôt le matin, un groupe a été formé par l'accusé, peut-être dix heures après la chute de l'avion [...] l'accusé a réuni un groupe de jeunes gens, des Interahamwe, qui étaient le mouvement de jeunesse de l'ex-parti présidentiel MRND. Il les a pris jusque chez lui et leur a dit "allez tuer, exterminer les Tutsi".
Ken Fleming a décrit le génocide des Tutsis et les massacres de Hutus modérés qui ont suivi la mort de Habyarimana comme "l'un des épisodes les plus barbares dans l'histoire de l'homme moderne". Il a annoncé que l'accusation apportera des moyens de preuve pour montrer comment Juvénal Kajelijeli a joué un rôle important dans les massacres de Tutsis dans sa commune de Mukingo et ses environs.
Le représentant du parquet a indiqué qu'il a des témoins, tant des survivants que certains de ceux qui ont participé eux-mêmes à ces massacres et qui ont reconnu leurs forfaits.
Juvénal Kajelijeli est poursuivi pour génocide, entente en vue de commettre le génocide, incitation directe et publique au génocide, crimes contre l'humanité incluant le meurtre, l'extermination, le viol et la torture, et pour des violations graves aux conventions de Genève applicables en temps de guerre.
Le représentant du parquet a allégué que Juvénal Kajelijeli avait "une intention spécifique de tuer" parce qu'il a dit aux Interahamwe D'aller tuer des Tutsis, provoquant une explosion de violences dans sa région au cours des jours qui ont suivi la chute de l'avion présidentiel, et parce que "l'accusé était capable de mobiliser six cents personnes armées, entraînées et en uniformes pour se livrer à une orgie meurtrière". Il a ajouté que des témoins viendront affirmer que les Interahamwe chantaient "exterminons-les, exterminons-les", preuve de l'intention de tuer les Tutsis.
Concernant le chef D'entente, Ken Fleming a indiqué que l'accusation apportera des preuves allant au-delà de tout doute raisonnable que l'accusé Kajelijeli était "le bras droit" de Joseph Nzirorera, ex-secrétaire général du MRND, et que les deux hommes se sont entendus avec D'autres pour commettre le génocide.
"Le viol apparaît à différents endroits dans l'acte D'accusation," a poursuivi le représentant du parquet. "Nous avons affaire également à des crimes contre l'humanité, qui ont trait aux souffrances humaines. Cela ne regarde pas seulement des gens qui ont subi des violences physiques, mais aussi ceux qui ont connu des angoisses mentales suite aux événements horribles auxquelles ils assistaient". Ken Fleming a cité l'exemple D'une mère, qui viendra déposer dans cette affaire, qui aurait assisté aux violences sexuelles exercées sur sa propre fille par un groupe D'Interahamwe.
Le parquet a introduit son premier témoin après la déclaration liminaire. Antonius Maria Tony Lucassen, un enquêteur hollandais travaillant pour le compte du TPIR, a présenté à la chambre des cartes et des photographies représentant des sites où auraient été commis les crimes reprochés à l'accusé. Les cartes et photographies montrent notamment les bureaux communaux de Mukingo et de Nkuli, la paroisse de Busogo et la cour D'appel de Ruhengeri.
Le procès a été reporté à mercredi matin, le conseil de la défense n'étant pas en mesure de procéder au contre-interrogatoire, les documents présentés par l'enquêteur lui ayant été remis tardivement.
La deuxième chambre du TPIR n'a pas conduit de procès depuis bientôt deux ans. Elle a seulement eu à entendre différentes requêtes présentées par les parties. Présidée par le juge sénégalais Laïty Kama, la chambre est en outre composée des juges tanzanien, William Hussein Sekule, et turc, Mehmet Güney.
JC/BN/AT/PHD/FH (KJ_0313A)